La pomme
brillante comme un rubis se détachait sur le gris du granit poli.
Comme tous les
ans en ce début mai, Raphaël se rendait avec sa petite fille Léa pour déposer
du muguet sur la tombe d'Alice.
Il y a
maintenant trois ans, elle le laissait seul avec Léa qui venait de naître. La
petite fille lui tenait la main parlant avec entrain dans les allées de ce
cimetière.
— J'aime bien
venir voir maman ! J'aime lui apporter des fleurs, je suis sûre qu'elle aime
ça.
— Oui ma chérie
! Ta maman aimait beaucoup les fleurs et le muguet est sa fleur préférée. Avant
que tu arrives, nous allions en chercher en forêt.
— Tu m'y
emmèneras ?
— Bien sur mon
amour.
Lorsque
l'enfant aperçut la tombe de sa mère, elle lâcha la main et se mit à courir.
Comme à chaque fois qu'il venait ici, les yeux de Raphaël s'embuaient de
larmes. Depuis le décès de son épouse, il n'avait jamais eu l'occasion de
penser à lui, à sa vie amoureuse. Son bébé et son travail lui avait pris tout
son temps. Sa mère et sa sœur le pressait de leur confier la petite pour qu'il
puisse prendre du temps pour lui, rencontrer du monde. Il n'en ressentait pas
le besoin.
— Papa !
Qu'est-ce que c'est ?
Il vit la pomme
et fut surpris.
— Je ne sais
pas !
Léa ramassa la
pomme et la regarda.
— Tiens papa !
Tu crois que c'est un cadeau de maman, pour moi ?
— Peut-être ma
puce ! dit-il en prenant le fruit. Il la regarda attentivement, il la tourna et
la retourna.
— C'est une
étrange pomme, peut-être ne devrait tu pas la manger.
— Mais, on
pourrait la ramener à la maison ? Cela me ferait un souvenir !
— Bien sûr ! répondit-il
en la mettant dans sa poche.
Ils déposèrent
les brins de muguet sur la tombe et après un dernier au-revoir, ils regagnèrent
leur appartement. Léa déposa la pomme sur un buffet à côté d'une photo de sa
maman disparue.
Raphaël regarda
sa fille avec tendresse et cru entrevoir luire le fruit artificiel quand la
petite fille posa ses lèvres dessus pour l'embrasser comme elle aurait embrassé
la joue de sa mère. Il ne s'attarda pas.
Il devait
préparer le repas pour sa sœur Maud qui passait le voir avec une amie.
Léa posa la
pomme à côté de la photo de sa mère, une jeune femme au regard triste.
La sonnette
retentit, Léa sauta du canapé toute excitée, oubliant son dessin animé.
— C'est tata !
Il se leva à
son tour pour accueillir les jeunes femmes.
— Raphaël, je
te présente Angélique.
— Enchanté de
te rencontrer, lui dit-il en s'approchant pour l'embrasser.
Pendant ce
temps, la petite fille tirait sur la jupe de sa tante pour lui montrer la
pomme.
— Regarde le
cadeau que maman nous a fait !
En voyant le
fruit, Maud sourit.
— C'est très
joli ! Où l'as-tu trouvé ?
— Au cimentière
sur la tombe de maman.
Il raconta
comment ils avaient découvert l'objet en allant déposer quelques brins de muguets.
Ils avaient décidé de le rapporter avec eux. Intriguée par la lueur qu'il dégageait,
Angélique se pencha.
— Je peux ? demanda-t-elle
en le prenant entre les doigts.
— Oui, bien-sûr
! lui dit Raphaël. Au moment où elle l'approchait de son visage pour mieux
l'observer, la pomme se délita. Un nuage de poussière rouge les enveloppa. Surpris
et étonnés, les deux jeunes gens ne réagirent pas tout de suite. Dans la
cuisine, le minuteur signalait la fin de la cuisson du plat.
— Je crois que
nous pouvons passer à table, releva Angélique en souriant à Raphaël, les yeux
brillants de désir.
Tout au long du
repas, ils se regardèrent, les yeux enamourés. Après le dessert, lorsque Maud
annonça qu'elle devait partir, Angélique lui dit qu'elle resterait bien un peu.
— Oui ! dit
Raphaël. Reste un peu ! Je te raccompagnerais plus tard.
Pour la
première fois depuis trois ans, il se sentait rempli de désir pour une femme.
Amusée, Maud
les embrassant en partant.
— Soyez sage ! leur
lança-t-elle.
Dès que la
porte fut refermée, Léa était couchée depuis longtemps, ils s'embrassèrent.
Leurs lèvres se
soudèrent l'une à l'autre. Leurs vêtements tombèrent les uns après les autres
sur le sol. Leur étreinte les conduisait vers la chambre.
En douceur,
Raphaël allongea sa compagne sur le lit, et lentement, ils fusionnèrent.
Ils luttèrent
toute la nuit, redécouvrant avec un plaisir partagé ce que leur envie de désir
commun leur disait d'essayer.
Au petit matin,
c'est une petite fille, les yeux encore rempli de sommeil qui vint tirer son
papa des bras de son amoureuse pour demander son biberon. En voyant la jeune
femme, elle lui demanda.
— Tu vas
devenir ma nouvelle maman ?
Surprise et
étonnée, Angélique ne put que lui répondre.
— Si tu le
veux, et si ton papa le veut.
Devant la photo
de la maman qui arborait un grand sourire, la pomme luisait dans le soleil
levant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire